Les conquêtes de Clovis, au tournant du siècle (Ve-VIe), avaient mis fin à la romanité sans, pour autant, donner aux gens une identité de rechange. Les Francs sont alors une minorité ils le resteront en huit générations ils seront complètement assimilés mais leur invasion a déstabilisé la délicate et complexe machinerie de l’Etat romain. Avec celui-ci se sont effondrés les ponts, les routes, les aqueducs et, plus grave, les écoles. Le « Regnum Francorum », l’expression est de Grégoire de Tours, n’est qu’un pompeux euphémisme que l’on essaye de substituer à la « Res Publica » de Dioclétien, mais sans arriver à changer la dure réalité quotidienne le pouvoir Franc est une « Res Privata » au sein de laquelle la Force brute domine la Loi. Le roi Franc s’est paré des oripeaux romains on le salue avec des « Votre Excellence », des « Votre Grâce » ou même des « Votre Sublimité », mais il reste un chef de tribu barbare et l’essence de son pouvoir royal reste l’émanation d’une culture guerrière. A l’origine, il avait été élu pour assurer le salut de la horde le temps d’un raid de viols et de rapines et il lui en était resté quelque chose. Il gouvernait sans système, imposant souvent par la terreur ce qui convenait à ses intérêts, à ses goûts ou à ses caprices d’enfant gâté mais si mortellement dangereux. Ce roi n’a aucun sens de l’Etat où l’aurait-il acquis ? Encore moins celui de la Nation Il s’est approprié le Domaine Fiscal, comme on prend la terre d’une ferme, et en avait fait son bien privé. A sa mort, ses descendants, incapables de concevoir quoi que ce soit plus loin que la coutume tribale, s’entredéchireront pour agrandir leur part du partage. Ensuite, afin de s’assurer de précaires et bien fragiles fidélités, ils distribueront des pans entiers de ce patrimoine
Les « capitales » ne sont pas réellement le centre du pouvoir ; celui-ci se déplace on serait tenté d’écrire « nomadise » – d’une villa royale à l’autre, et la caravane royale consomme sur place les ressources disponibles jusqu’à leur complet épuisement.
