Souvenir de 1940 : Histoire vécue.

Sur une route du Nord de la France, un couple marche lentement. L’homme est devant, très mince, quasi décharné, il avance avec peine. Il évite les gros pavés du milieu de la route et ses
semelles épaisses soulèvent la poussière du bas-côté. Il porte deux lourds cabas. Pour équilibrer un peu la charge, il les a attachés ensemble avec un bout de vieille ficelle et les a jetés par-dessus son épaule : un lui écrase le dos, l’autre lui bat les côtes à la cadence de ses pas. II ne s’en rend pas compte, il est épuisé, ses genoux fléchissent de plus en plus mais une sorte d’automatisme le pousse en avant : il faut fuir, fuir encore.

Parfois, il se retourne pour vérifier si sa femme le suit toujours. Elle résiste mieux, c’est une solide
paysanne. Jamais de sa vie, elle ne s’est permise d’émettre la moindre plainte. Pourtant ses pieds,
affreusement déformés par d’énormes callosités, la font souffrir atrocement. Elle n’a, depuis de
nombreuses années, jamais plus porté de souliers et aujourd’hui encore, elle est chaussée de cette sorte d’escarpins formés d’une semelle en caoutchouc noir très souple et d’une empeigne en forte toile grise. Malgré la chaleur accablante, elle s’est coiffée d’un lourd châle de laine espérant ainsi se protéger du soleil. Mais son gros chignon est trempé et la sueur lui coule dans le dos.

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